Comme les États-Unis ne reviennent toujours pas que l'Iran ait réussi à s'autodéterminer au détriment des intérêts occidentaux, en chassant le Shah Mohammad Reza Pahlavi en 1979 pour instaurer État islamique bien décidé à redéfinir le rapport de force l'opposant aux anciennes puissances coloniales, l'occident et l'Europe en particulier n'a jamais vraiment compris comment une Russie délabrée, démembrée et croulante sous son propre poids, avait accompli le tour de force de se réapproprier l'essentiel de ses richesses alors confisquée par une classe d'oligarques acquis au libéralisme mondialisé et chargé de continuer de dépecer la Russie pour mieux la mettre sur le marché.
La prise du pouvoir en Russie par Poutine est la cristallisation de la défaite de ce clan "mafieux" contre un autre directement issu du seul organe qui a pu résister à la chute de l'URSS : les services de renseignements. C'est donc un peu comme une armée de libération que ces derniers ont entrepris de mener le combat contre la main mise étrangère sur les richesses du pays. Une des prises de guerre les plus symboliques a été Mikhail Khodorkovsky, un homme qui a fait l'essentiel de sa fortune en misant sur la perte de vitesse et l'éclatement du bloc soviétique (Glasnost et Perestroïka), ce qui fait de lui un des collaborateurs (en connaissance de cause ou pas) des évènements du début des années 90 dans cette partie du monde.
La persécution judiciaire dont il a été victime (et dont l'occident refuse d'admettre qu'elle puisse avoir un fond de légitimité dans le contexte décrit plus haut) a été le moyen symbolique par lequel l'administration Poutine, nouvelle autorité à bord, a fait comprendre à tous les opportunistes qui s'étaient gavés sur le dos d'une Russie mourante qu'il n'y avait plus qu'un camp dans lequel ils avaient une chance de conserver leurs acquis : celui d'une Russie forte et décomplexée, maîtresse de ses richesses, refusant de mettre tout son poids dans la balance de l'hystérie libérale réclamée par Wall Street, et capable de faire plier ONU et OTAN sur l'échiquier géopolitique.
Face à ce tour de force, l'Europe, quasiment esclave du gaz russe que l'ancien dirigeant de Yukos avait la charge de rendre disponible sans conditions, n'avait donc plus que le registre des droits de l'homme et de la démocratie pour tenter de faire pression sur la Russie en gardant un fond de légalité. La propagande qui a sacré Mikhail Khodorkovsky champion de la démocratie en est une illustration, tout comme les tentatives dintervenir en Tchétchénie, l'affaire Géorgienne, la révolution orange en Ukraine ou encore les attaques contre la biélorussie.
S'il y a une chose à retenir, c'est que c'est l'hypocrisie occidentale qui a en grande partie servi de tremplin au redressement de la Russie. Au lieu donc de défendre des mafieux incarcérés qui ont acquis leur fortune dans des circonstances assez troubles, l'occident ferait mieux d'accepter que l'ours russe l'a rattrapé et devrait commencer à aborder cet adversaire autrement.